L'hyperperméabilité intestinale
L’intestin est souvent le théâtre de fortes turbulences durant l’activité sportive
Les muscles, la peau ainsi que d’autres tissus (cerveau, poumons, cœur) bénéficient soudain d’un surcroît d’irrigation sanguine afin de faciliter les échanges gazeux, de couvrir les besoins musculaires en oxygène et en énergie, et d’éliminer via la sudation et la vaporisation de la sueur l’excès de chaleur produite par le tissu musculaire. L’organisme, contraint de s’adapter à cette nouvelle situation, réduit par conséquent le flux sanguin destiné au tube digestif et à l’ensemble du territoire splanchnique. Ce phénomène porte le nom d’ischémie. En outre, cette baisse est majorée si l’effort est intense, de longue durée, en présence d’une hydratation insuffisante et/ou inadaptée, et qu’il s’effectue dans une ambiance chaude et humide. A l’effort, l’intestin subit donc l’association de 3 stress : vasculaire, énergétique et thermique.
Cette triple agression, qui plus est en présence d’une possible dysbiose (déséquilibre du microbiote intestinal), augmente le risque d’une altération de sa fragile muqueuse. Les dommages interviennent souvent au niveau des jonctions serrées, sorte d’échafaudages protéiques reliant solidement les entérocytes entre eux, et n’autorisant ainsi le passage qu’à de petites molécules issues de la digestion des aliments.
Nous serions donc tentés de croire que l’arrêt de l’exercice sonne la fin des tempêtes intestines. Que nenni ! Certes, l’ischémie s’estompe progressivement et le tube digestif retrouve lentement une irrigation normale. Mais cet afflux de sang et d’oxygène s’accompagne malheureusement d’une arrivée parfois massive de substances agressives et dérivées de l’oxygène. Ces composés, connus sous les termes de radicaux libres, accentuent davantage encore les éventuels dégâts occasionnés durant la phase d’ischémie au sein de la muqueuse et de ses jonctions serrées.
Ces épisodes d’ischémie-reperfusion inhérents à l’effort physique constituent par conséquent une double contrainte pour l’intestin. Ils sont susceptibles de créer des béances dans la paroi intestinale et d’établir insidieusement des conditions favorables à une hyperperméabilité. Cette perte d’étanchéité a été illustrée par l’expression « leaky gut syndrom » ou « le syndrome de l’intestin qui fuit ». Dès lors, des protéines mal digérées, des toxines, des fragments bactériens peuvent traverser la muqueuse en dehors des passages orthodoxes matérialisés par les cellules M, et induire de nombreux troubles subséquents à des réactions inadaptées et amplifiées du système immunitaire entérique (allergies/intolérances, inflammation, maladie auto-immune…). A l’inverse, des déficiences nutritionnelles peuvent apparaître car les dégradations de la muqueuse et des jonctions serrées précipitent la perte de récepteurs et de voies de passage réservés à l’absorption des micronutriments de notre ration. Un peu comme si le videur à l’entrée d’une boite de nuit autorisait tout à coup l’entrée à des fauteurs de troubles, et se mettait à congédier les noctambules respectueux.
Vous l’aurez compris, l’intestin du sportif est classé zone sensible et sa prise en charge devrait constituer une priorité. Les maux de ventre constituent d’ailleurs fréquemment un motif d’abandon durant les épreuves d’endurance (trails, Ironman, cyclotouristes…).
Je vous prie donc de trouver ci-dessous quelques recommandations diététiques et quelques conseils de complémentation qui, je l’espère, vous permettront de préserver la santé de votre intestin. Histoire de ne pas faire un bide lors de vos prochaines compétitions !
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Les conseils du diet :
Respect de 2 jours non consécutifs de repos complet/semaine : arrêt des épisodes d’ischémie-reperfusion, décélération du transit et donc augmentation du temps de contact des aliments avec la muqueuse intestinale (gain d’absorption des nutriments)
Suppression/limitation des aliments aptes à provoquer des réactions adverses : éviction plus ou moins longue des céréales riches en gluten (blé, orge, seigle, avoine…) et des produits laitiers. L’adhésion du gluten contre la paroi intestinale stimule la production par les entérocytes d’une protéine (la zonuline) capable de désorganiser les jonctions serrées
Consommation journalière d’aliments sources d’acides gras insaturés pour la régénération de la muqueuse intestinale (huiles bios, vierges, de première pression à froid (olive, colza, de noix, chanvre, lin…), poissons gras (sardines, maquereaux, harengs…)
Consommation journalière d’aliments riches en antioxydants (fruits et légumes, épices (curcuma), chocolat noir, thé vert…)
Consommation journalière d’aliments riches en fibres : la digestion des fibres par la flore du côlon aboutit à la synthèse d’acides gras. Ces acides gras (le butyrate en particulier) participent au maintien de l’intégrité de la muqueuse colique (sources de fibres : végétaux, céréales complètes, légumineuses)
Consommation régulière d’aliments sources de glutamine (viandes, poissons, œufs, légumineuses, céréales), acide aminé essentiel à la régénération de la muqueuse du grêle.
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